Auparavant, la rentrée politique de la Haute-Garonne avait lieu, très souvent, au siège de l’Hôtel de département, dans la grande salle des pas perdus, à proximité de l’hémicycle départemental. Cette année, le nouveau président Sébastien Vincini a imposé un changement de décor. Place à un petit espace de la mairie de Cintegabelle [1], dans son fief politique. L’élu local en fut le maire entre le printemps 2020 et la fin 2022 et le conseiller départemental [2] depuis 2015. Ce village est aussi célèbre pour avoir été la terre d’élection de l’ancien Premier ministre socialiste Lionel Jospin, qui fut conseiller départemental [3] et député [4]
Le président de Haute-Garonne a trente ans de moins [5] que le Premier ministre de la Gauche plurielle mais, comme lui, aime exprimer son attachement au village haut-garonnais situé à la confluence de l’Hers et de l’Ariège. « C’est ici que tout a commencé pour moi, ici que je vis. C’est l’endroit où je me ressource, mais aussi là où je me confronte aux réalités et aux vécus des autres », résume le chef de l’exécutif départemental.
Face à la presse, il est venu présenter longuement « sa feuille de route », « ce qui fait [son] ADN politique ». Ce que son prédécesseur Georges Méric aurait nommé « sa boussole conceptuelle ». Selon Sébastien Vincini, cet ADN est l’« éco-socialisme ». En effet, il « ne veut pas séparer question écologique et question sociale ». « Il faut accélérer franchement sur la planification écologique. Nous avons seulement dix ans pour éviter les pires scénarios », estime l’élu.
Une carte vitale pour se faire rembourser l’achat d’aliments de base
Parmi les actions engagées par son Département par rapport à la transition écologique et sociale, l’ancien maire de Cintegabelle met notamment en avant « les 3000 places de covoiturage supplémentaires qui seront mises en place à travers le département », « les contrats pour atteindre la neutralité carbone signés avec des mairies rurales » et, plus nouveau, « une expérimentation d’un projet de sécurité sociale alimentaire » nommé Caissalim.
Portée par onze associations, cette dernière sera mise en place entre 2023 et 2025 sur quatre territoires autour de Toulouse [6] et consistera en la mise à disposition d’une carte vitale qui permettra de se faire rembourser l’achat d’aliments de base, essentiels pour être en bonne santé [7]. Selon l’élu socialiste, c’est « une manière de soutenir concrètement les plus de 13 % de la population qui vivent sous le seuil de pauvreté [8] en Haute-Garonne », tout en rappelant que 25 % des moins de 30 ans vivent sous ce seuil. Sébastien Vincini dit par ailleurs « regretter » la baisse des ressources financières dédiées au département, ce qui empêche l’échelon départemental d’être « plus ambitieux encore sur les questions écologiques ».
Face aux épisodes de catastrophes écologiques qui se multiplient (canicules, orages violents, etc.), il reconnaît « qu’il faut être désormais dans une culture de l’adaptabilité, du risque ».
« Nous voyons que l’on ne va pas pouvoir empêcher certaines catastrophes d’arriver. Il faut donc mettre en place des plans pour agir vite, en concertation entre les collectivités, les services de secours, les prefectures dans des moments d’urgence », résume le chef de l’exécutif de Haute-Garonne, qui a salué notamment l’action efficace du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) lors des incendies ou des épisodes caniculaires des deux dernières années.
Sur le dossier polémique de l’autoroute A69 entre Castres et Toulouse, Sébastien Vincini se démarque du soutien clair apporté au projet par Carole Delga, la présidente de la Région Occitanie. Si le Département ne reviendra pas sur le financement qu’il avait accordé au projet [9], il n’accordera « plus un euro de plus à celui-ci ». « Ce projet avait sa logique par le passé. Mais avec l’accélération de la crise climatique, il est tout à fait compréhensible que beaucoup le remettent en cause aujourd’hui », dit-il.
Union de la gauche et initiative politique d’ampleur
Niveau politique nationale, l’ancien secrétaire fédéral du PS en Haute-Garonne est sur la même longueur d’onde que l’actuel Premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure. Comme lui, il croit que « l’union de la gauche est le seul moyen de l’emporter actuellement, localement et nationalement ».
Celui qui fit partie de l’équipe chargée en 2022 de négocier l’accord législatif avec les futures forces de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) exprime aussi comme beaucoup de membres de l’alliance, « son doute » vis-à-vis des suites de « l’initiative politique d’ampleur » menée par le président de la République avec ses oppositions.
« Nous avons connu d’autres grandes initiatives d’Emmanuel Macron qui n’ont rien donné comme les cahiers de doléances par exemple. On attend de voir, mais sur l’écologie, ses premières propositions suite aux Rencontres de Saint-Denis ne vont pas du tout assez loin. Il faudrait actuellement, pour financer la transition, s’attaquer aux inégalités de patrimoine. Et, parallèlement, être beaucoup plus exigeants avec des grands groupes industriels comme Total », souligne l’auto-proclamé écosocialiste.
Matthias Hardoy
Sur les photos : Le président du département de Haute-Garonne Sébastien Vincini entouré de son équipe d’élus. Cette année, sa rentrée politique avait lieu dans son fief politique de Cintegabelle. Crédit : Aurélien Ferreira-CD31.
Un revenu de base pour les jeunes, un projet qui n’est plus d’actualité
En ce qui concerne le projet de revenu de base pour les jeunes lancé par son prédécesseur dont l’expérimentation fut stoppée par la prefecture, Sébastien Vincini reconnaît que « le projet est en pause et ne se réglera pas dans l’immédiat », dans « l’attente d’avancée au niveau national sur le sujet ». Il est « en dialogue aussi avec d’autres départements pour faire avancer cette question dans les années qui viennent ».
Notes
[1] La commune de Cintegabelle se trouve dans le département de la Haute-Garonne. Elle se situe à 33 kilomètres de Toulouse et à 23 kilomètres de Muret.
[2] Canton d’Auterive. Le nouveau canton d’Auterive depuis 2015 est formé de communes des anciens cantons d’Auterive (9 communes), de Rieux-Volvestre (10 communes), de Carbonne (11 communes), de Montesquieu-Volvestre (10 communes), de Cintegabelle (6 communes), et du Fousseret (1 commune).
[3] De 1988 à 2002.
[4] De 1986 à 1997.
[5] 1978 contre 1937.
[6] Nord (Les Izards/Borderouge), Saint-Exupéry (Pont des demoiselles/Saint-Exupery), quartier des Pradettes et Ramonville/Castanet-Tolosan.
[7] Le budget total de l’opération est de 511.170 euros. Pour le conseil départemental, il devrait en coûter 40.000 euros pour les trois ans d’expérimentation.
[8] Revenus inférieurs à 1102 euros par mois.
[9] 355.140 euros