Deux ans après son placement en redressement judiciaire, le groupe Carré affiche un carnet de commandes équivalent à deux ans de chiffre d’affaires. Quelle a été votre stratégie ?
Il y a deux ans nous avions essuyé de multiples crises : le Covid-19, la guerre en Ukraine, la hausse des coûts de matériaux, qui a fortement impacté la métallerie, notre cœur de métier… Et nous étions par ailleurs engagés dans une course au chiffre d’affaires devenue intenable. J’avais 240 salariés, des chantiers dans toute la France et un carnet de commandes pourtant très faible. Pour sortir de l’impasse, je n’ai pas eu d’autre choix que de restructurer fortement l’entreprise avec un mot d’ordre : faire moins et faire mieux. Nous nous sommes donc recentrés sur notre cœur de métier, nous avons ciblé nos clients et nos marchés et j’ai engagé un nouveau directeur général, Charley Ferra. Cette dynamique a rapidement porté ses fruits.
Comment se porte le groupe Carré aujourd’hui ?
Nous avons retrouvé un niveau d’activité très élevé avec 44 millions d’euros engagés en carnet de commandes à trois ans, et un chiffre d’affaires de 21,6 millions d’euros à fin 2025. Mais nous nous sommes recentrés, car notre chiffre d’affaires a réduit de 25 % depuis la crise, et le groupe Carré s’appuie aujourd’hui sur 150 collaborateurs. Nous surfons notamment sur la vague du chantier du métro à Toulouse et intervenons sur plus de quatorze stations. C’est un marché consolidé qui nous donne de la visibilité jusqu’à 2029. Mais il n’y a pas que ça. Nous travaillons aussi sur les marchés d’entretiens avec de grands donneurs d’ordre publics et parapublics, notamment le Conseil départemental de la Haute-Garonne, les hôpitaux de Toulouse... Nous veillons d’ailleurs scrupuleusement à répartir notre chiffre d’affaires entre les marchés d’entretiens et les marchés neufs.
Diriez-vous que vous êtes à contre-courant dans un secteur qui ne va pas très bien ?
Ouin sans doute, puisque nous estimons, à la Fédération française du bâtiment, que le secteur du bâtiment dans son ensemble prévoit une contraction de l’activité de 2 % cette année. Les décisions que nous avons prises il y a deux ans nous ont permis de nous restructurer et de devenir plus agiles et flexibles. Aujourd’hui, même à l’intérieur des grosses structures du groupe, les unités ne dépassent pas quarante personnes. Par ailleurs, nous avons investi à hauteur de 350.000 euros dans de nouvelles machines de découpe laser de tôles et de tubes. Cela nous permet d’améliorer nos process de production et de gagner jusqu’à 20 % de productivité pour conserver nos marges. C’est comme cela que nous tirons notre épingle du jeu.
Vous avez aussi décidé d’ouvrir votre actionnariat au management. Pourquoi ce virage ?
Quand on sort d’une crise, il est indispensable d’avoir à ses côtés des gens intéressés. Savoir déléguer, s’entourer de personnes de qualité et de nouvelles méthodes de management, je pense que c’est ce qui fait que les gens ont envie de rester dans l’entreprise. C’est pourquoi, en effet, j’ai décidé d’intégrer mon directeur général Charley Ferra à l’actionnariat de la holding et ce ne sera, sans doute, qu’une première étape. À travers cela, je prépare aussi la transmission future de l’entreprise à mon fils, aujourd’hui âgé de 19 ans. Le jour où il nous rejoindra, le directeur général sera un pilier qui fera le lien entre les générations.
Propos recueillis par Béatrice Girard
Sur la photo : Frédéric Carré, président du Groupe Carré et président de la FFB Occitanie, revient pour ToulÉco sur sa stratégie de sortie de crise. Crédit : Rémy Gabalda-ToulÉco.