Deux mois après la fin de la grève de septembre, le dialogue social est de retour. Avec la constitution de groupes de travail associant le personnel aux dirigeants autour des nouveaux projets, l’ambiance s’est améliorée. Les ouvriers de la biscuiterie de Montauban ont enfin l’impression d’être écoutés. Il faut dire que la direction a dû mettre de l’eau dans son vin. Pour les 390 employés travaillant depuis des décennies dans la biscuiterie familiale Poult, le ras de bol était devenu général. Après leur mobilisation record les 11 et 12 septembre et toutes les lignes de production à l’arrêt, la direction a enfin accepté de les entendre.
De fait, depuis 2016, le management de l’ancienne Biscuiterie Poult avait bien changé. Alors qu’elle fonctionnait avec une gouvernance participative adoptée par la direction en 2006, elle était passée au management des fonds d’investissement. En 2016, le nouvel actionnaire, Qualium Investissement, décidait de supprimer cette gouvernance participative et le rachat par le fonds américain Platinum Equity, en 2019, avait encore éloigné les employés de leur direction. Au fil des ans, la biscuiterie, créée en 1883 par la famille Poult, était devenue le groupe Biscuit International, avec trente usines en Europe. Malgré la crainte de voir les lignes de production montalbanaises délocalisées dans l’une des autres biscuiteries, les salariés ont été 98 % à débrayer en septembre dernier.
Sauver le temps de pause
Le déclencheur de ce taux de mobilisation record aura été la remise en question du temps de pause. Alors qu’il est de 30 minutes minimum pour 8 heures de travail, les ouvriers des lignes Poult avaient négocié 1 heure par jour, la disposition des bâtiments impliquant des déplacements chronophages. Pour l’instant, la direction s’est engagée à ne pas toucher à ce temps de pause des équipes. Autre point sensible, le dialogue social totalement absent du management de Platinum Equity. Sans écoute, certaines décisions semblaient prises en dépit du bon sens, comme l’explique Robert Pouchereau, délégué central FO : « La direction avait déplacé les salariés de maintenance de premier niveau sur d’autres lignes de production. Ce sont les personnels qui égalisent les rangées de biscuit et retirent ceux qui ne sont pas conformes. Or, sans ces agents, les lignes se bloquent bien plus souvent et il faut attendre la mobilisation du deuxième niveau de maintenance pour remettre la ligne en route. Ce type de décision nuit à la productivité même de l’usine. »
Même constat du côté de la CFDT. « Nous ne sommes pas contre de nouveaux modes de production, notamment pour améliorer la sécurité », souligne le délégué Philippe Gevrey. « Mais nous voulons que chaque ajustement soit étudié par un groupe de travail auquel participe les chefs de service. » Pour les partenaires sociaux, la mise en place des groupes de travail et les engagements de la direction vont dans le bon sens. Mais ils vont rester vigilants. Le groupe Biscuit international compte aujourd’hui 5000 salariés sur trente sites en Europe. Il affiche un chiffre d’affaires supérieur à un milliard d’euros. Les dirigeants de l’entreprise n’ont pas souhaité répondre à nos questions sur le sujet.
Florence Pinaud
Sur la photo : La biscuiterie, créée en 1883 à Montauban par la famille Poult, est devenue le groupe Biscuit International. Photo d’archives : Hélène Ressayres - ToulÉco.
