« Une fois de plus, les entreprises montrent le chemin. » À l’occasion de la rentrée économique et de la sortie du Top Éco [1], le président du Medef 31, Pierre-Olivier Nau, n’a pas mâché ses mots. S’il salue l’arrivée d’un Premier ministre « favorable aux entreprises et aux territoires », il s’inquiète d’un climat politique trop sensible aux extrêmes. « Ma seule crainte, c’est que les modérés démissionnent. Car sous sommes résolument modérés », insiste-t-il.
Toujours pas de quoi se réjouir. Entre incertitudes fiscales et tensions sociales, le patronat haut-garonnais juge l’atmosphère « délétère ». Le nombre de procédures collectives reste mal orienté : +7 à 10 % de faillites par rapport à l’an dernier, pas vraiment compensées par les créations, majoritairement des auto-entreprises.
Sur le même thème : Face à la crise budgétaire, le Medef Occitanie appelle à plus de décentralisation
« La seule certitude, c’est l’incertitude », résume le patron des patrons du 31, qui entame sa dernière année de mandat. Les représentants des filières économiques locales portent un voeu commun de visibilité et de stabilité, pour rétablir la confiance. « Sans elle, pas de consommation, pas d’investissements, pas de relance », affirment-ils à l’unisson.
Le BTP toujours à la peine, l’industrie fragilisée, le numérique porteur d’espoir
Dans le bâtiment, le neuf, qui représente 44 % de l’activité, reste en forte contraction (-15 %). La baisse atteint 30 % sur le hors-logement, porté par des collectivités publiques en mal de visibilité, qui reportent voire annulent leurs investissements. Pas beaucoup mieux du côté de la rénovation, qui pâtit des « stop and go » des dispositifs publics. « On subit aujourd’hui une baisse de 50 % de la rénovation énergétique. Ce qu’on demande au gouvernement, ce ne sont pas des aides mais de la stabilité, de la confiance », martèle Mathieu Roudié, président de la Fédération du BTP.
L’industrie, elle, avance en ordre dispersé. Selon Didier Katzenmayer, vice-président de l’UIMM, « la croissance est artificiellement soutenue par les stocks ». Si le chiffre d’affaires global est en hausse de 4,5 points en Occitanie, région tirée par la forte croissance (+8,6 %) de l’aéronautique et du spatial, l’automobile recule fortement. Et malgré des « trésoreries équilibrées » selon la Banque de France, « les marges faibles limitent le réinvestissement », souligne-t-il.
Le numérique, « qui caracole depuis quinze ans à +15 %», marque aussi le pas. Les éditeurs de logiciels résistent, les ESN [2] stagnent. « Pas folichon, mais on reste en croissance », tempère Frédéric Honnorat, du Syntec. Deux enjeux dominent : poursuivre les profondes transformations liées à l’IA et relancer l’emploi des jeunes, en souffrance (-28 % d’offres d’alternance en Occitanie, -20 % de jeunes diplômés embauchés).
Les services en première ligne de la crise
Du côté des services, le constat est encore plus sombre. L’événementiel reste en berne. Dans la restauration, Thomas Fantini (dirigeant de Maison Pergo) dénonce « 20 % de coûts supplémentaires en quatre ans, avec l’impossibilité d’augmenter les prix sans perdre les clients ». « On est en train de tuer à petit feu ce fleuron français qu’est la gastronomie », s’insurge le représentant des professionnels de la restauration, « asphyxiés par les PGE à rembourser et la baisse des trésoreries ». Autre sujet d’inquiétude, partagé par ses homologues : l’alternance, dont le reste à charge pour les entreprises a fortement augmenté.
Même sentiment dans la propreté : « Vous nous voyez tous mais vous ne nous entendez pas », résume Magaly Baldy, de la Fédération des entreprises de propreté d’hygiène & services associés. Avec 1500 postes vacants en Occitanie, le secteur souffre du ralentissement de ses donneurs d’ordre et réclame un allègement des charges.
La transition énergétique accentue par ailleurs la pression sur le secteur du transport, « qui emploie 13.000 personnes rien que dans la métropole toulousaine », rappelle Guillaume Chavanat. Enfin, la mauvaise santé des commerçants et artisans reflètent le moral des Français. « Pas de relance sans consommation », rappelle Guillaume Duval, président de la Fédération des commerçants de Toulouse.
Marie-Dominique Lacour
Sur la photo. De gauche à droite : Guillaume Duval (Président de la fédération des associations de commerçants de Toulouse), Guillaume Chavanat (Représentant de l’organisation des transporteurs), Magaly Baldy (Secrétaire générale de la FEP CSO), Pierre-Olivier Nau (Président du Medef 31), Mathieu Roudié (président de la FBTP 31), Jean-Julien Lascaux (Délégué régional du Syntec Ingénierie). Crédit : Marie-Dominique Lacour - ToulÉco.