Fusionnés avec les huissiers, le casse-tête des commissaires-priseurs

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Depuis le 1er juillet 2022, les huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires ont fusionné pour devenir des commissaires de justice. Une réforme ambitieuse, censée moderniser la profession et favoriser l’installation de nouveaux acteurs, mais dont l’application reste contrastée.

Serait-ce le mariage de la carpe et du lapin ? Depuis juillet 2022, les huissiers de justice et les commissaires-priseurs judiciaires ont fusionné sous le titre unique de “Commissaire de justice” [1]. En juillet 2026, fin de la période transitoire, les deux anciennes appellations disparaîtront. Une petite révolution : en plus de favoriser la création d’offices, la loi permet d’ores et déjà à chacun d’exercer les missions de l’autre, à condition d’avoir suivi la formation passerelle. C’est le cas de Camille Chabroux, commissaire-priseur toulousaine (judiciaire et volontaire), qui souhaite pourtant rester centrée sur son activité initiale : « Même avec la formation, huissier reste vraiment un autre métier que le mien », constate-t-elle.

Comme elle, la plupart des ex-commissaires-priseurs à l’activité judiciaire ont choisi le statu quo. En revanche, de nombreux ex-huissiers de justice ont eux saisi l’opportunité d’ajouter à leurs activités les ventes judiciaires, jusqu’alors réservées au CPJ. « Ce n’est pas forcément plus rentable pour eux mais peut-être plus valorisant. Le métier d’huissier pâtit depuis longtemps de son image, c’est une bonne chose d’en changer le nom et d’élargir leur périmètre », reconnaît Camille Chabroux, bien qu’elle déplore que la réforme ait entraîné une concurrence accrue.

« Un commissaire-priseur aime l’art et s’émerveille de tout, tout le temps »

Installée à son compte depuis mai 2023, la jeune chef d’entreprise fait face à une demande importante. Et si le volet judiciaire s’avère moins intéressant financièrement qu’avant, suite à l’arrivée des ex-huissiers, sa maison de ventes a de quoi faire. Les enchères s’y succèdent chaque semaine, dans leur diversité, du matériel professionnel aux voitures en passant par des collections particulières d’art ou d’archéologie… Et deux à trois fois par an, des ventes “Prestige”, pour les amateurs d’objets exceptionnels. « J’ai de la chance, ça marche bien. Tout mon enjeu est de maintenir des relations personnalisées avec mes clients, de garder cette proximité qui fait toute la différence. »

Bien qu’elle ne l’envisage pas à ce jour, la réforme pourrait conduire à terme la commissaire-priseur à abandonner son activité de commissaire de justice pour se consacrer uniquement aux ventes volontaires. Car jamais Camille Chabroux ne renoncerait à son amour de l’art, au cœur de ce métier-passion : gemmologue de formation, professionnelle des enchères depuis douze ans, elle n’a rien perdu de sa fascination pour les pierres précieuses. « Il y a une intimité qui se crée entre le bijou et son porteur. Tous racontent une histoire », confie-t-elle.
Marie-Dominique Lacour

Sur les photos : Camille Chabroux. Crédits : Samuel Cortes.

Notes

[1À noter que l’activité dite “volontaire” des commissaires-priseurs, régie par le Code de commerce, n’est pas concernée.

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Source : https://www.touleco.fr/Fusionnes-avec-les-huissiers-le-casse-tete-des-commissaires,48143