Officialisé fin août 2025 par le décret n°2025-840, un nouvel article introduit dans le Code de commerce permet désormais aux entrepreneurs de demander la confidentialité des informations relatives à leur domicile personnel dans le RCS et le RNE. Objectif affiché : réduire l’exposition des dirigeants au démarchage, au harcèlement... Ou à des menaces plus graves. Le 13 mai dernier à Paris, la fille et le petit-fils du PDG de la société de cryptomonnaies Paymium étaient victimes d’une tentative d’enlèvement, devant leur domicile. Un triste épisode, qui aura permis de mettre en lumière la problématique : l’adresse personnelle des dirigeants est partout sur internet et figure notamment en toutes lettres sur l’extrait Kbis, consultable par tous.
Le nouveau dispositif ouvre la possibilité de l’occulter au grand public, tout en le laissant consultable par les organismes affiliés : autorités judiciaires, organismes de finances publiques, douanes, police, etc, ou encore notaires, huissiers et administrations diverses. Concrètement, « la demande se fait en ligne », explique Leïla Devesse, formaliste. « Elle est gratuite lorsqu’elle accompagne une immatriculation ou une modification, mais avec des frais si elle est isolée », ajoute-t-elle. Le greffe doit y répondre sous cinq jours.
Une "réforme" incomplète et contraignante
Apparaît ainsi une première limite : le coût. Environ 53 euros pour un Kbis, 8 euros par acte (détails en bas de page). [1] S’y ajoutent pour les professionnels des obstacles procéduraux. « On doit faire la demande accompagnée d’une déclaration de confidentialité signée. Certains greffes demandent une demande par dirigeant ou associé, d’autres une déclaration unique… On peut se voir rejeter la demande puisque tout n’est pas harmonisé », explique Leïla Devesse. Les formalistes doivent par ailleurs produire un second acte “biffé”, c’est-à-dire une copie de l’acte initial en masquant l’adresse personnelle. Une contrainte fastidieuse.
Si mieux protéger la vie personnelle des dirigeants semble être un souhait unanimement partagé, la pertinence de la mesure, elle, interroge. En effet, l’occultation ne concerne ni les annonces légales ni le Bodacc et certains associés demeurent identifiables, comme ceux mentionnés dans la liste des souscripteurs d’une SAS. « C’est une première réponse concrète au risque qui pèse sur les dirigeants mais elle paraît incomplète. Sans une vraie réforme, cela reste et restera très facile de trouver l’adresse personnelle d’un entrepreneur », observe Leïla Devesse.
Enfin, l’occultation suppose une démarche volontaire. « Elle aurait pu devenir automatique assez facilement, c’est dommage », conclut la formaliste, qui salue néanmoins l’avancée tout en soulignant ses limites.
Marie-Dominique Lacour
Sur la photo : Leïla Devesse, Cap Formalités. Crédit : Hélène Ressayres - ToulÉco.
Notes
[1] Si la demande concerne :
1. Uniquement le Kbis : 53,38 € TTC (44,48 € HT + 8,90 € TVA)
2. Un ou plusieurs actes à remplacer : 7,63 € TTC par acte (6,36 € HT + 1,27 € TVA)
3. Le Kbis + un ou plusieurs actes : 53,38 € TTC (Kbis)+ 7,63 € TTC par acte modifié
Exemple : un acte 61,01 € ; deux actes 68,62 €, etc.