Portée sur les fonds baptismaux par une mère et son fils, la maison Anne.K s’est imposée en moins de dix ans comme l’un des rares ateliers en France à créer, fabriquer et vendre ses modèles de médailles religieuses. Son histoire débute en 1996 lorsque Anne Kirkpatrick, ancienne institutrice, se lance dans la réalisation d’une sculpture de la Vierge pour la place de son village gersois après la demande de la paroisse de Vic-Fezensac. Cette œuvre en pierre reconstituée signe le début de sa carrière d’artiste et suscite d’autres commandes, notamment un ensemble de trois statues pour la maison d’accueil Beth Maryam, à Lourdes.
Sollicitée par les ateliers Seral, qui frappent leurs médailles souvenirs depuis 1946 dans la cité mariale, Anne Kirkpatrick crée pour eux un modèle et amorce un virage dans sa pratique au début des années 2000 en se spécialisant dans la création de médailles de baptême. Très répandu au début du XXe siècle, cet art sacré a alors presque totalement disparu. D’abord médailleuse pour une maison marseillaise, la sculptrice se lance à son compte en 2010. La marque Anne.K naît quatre ans plus tard avec l’aide de son fils, entrepreneur dans l’informatique, qui veut mettre en lumière le talent maternel.
Dans un premier temps, le duo fait appel à la maison Arthus Bertrand, une institution née en 1803, pour créer les matrices d’acier servant à frapper les médailles. Mais, rapidement, Bruce Kirkpatrick décide de se former comme graveur pour réaliser lui-même ces pièces maîtresses. En 2021, il va plus loin encore en intégrant dans son atelier gersois l’estampage des bijoux – la frappe – jusque-là sous-traité à un artisan lyonnais. « Nous avons internalisé toutes les étapes, la création sculptée, la fabrication des médailles et la vente, c’est rarissime dans un même atelier. Nous sommes les seuls en France à le faire avec Arthus Bertrand et la Monnaie de Paris », souligne Bruce Kirkpatrick.
Savoir-faire artisanal
Les premiers gestes sont évidemment ceux de l’artiste. Une fois travaillé à la plastiline, une pâte à modeler de précision, le motif dessiné par Anne Kirkpatrick est monté sur un disque de plâtre de 20 cm de diamètre. Toute la difficulté est de réussir le méplat en donnant l’illusion de relief avec un motif de 5 cm d’épaisseur maximum et en conservant les bonnes proportions, quel que soit l’angle sous lequel on regarde la médaille.
Après cette étape minutieuse et complexe qui prend plusieurs mois, vient le temps du moulage en plâtre et des dernières corrections de la sculptrice. Commence alors le travail du graveur. « À partir du plâtre de ma mère, je réalise un moule en résine pour obtenir un modèle en creux que je passe dans un tour à réduire. La machine, qui travaille à 800 nanomètres près, va le reproduire au diamètre voulu dans l’acier. Cette matrice, placée dans une presse hydraulique, servira à frapper la médaille, à imprimer le motif sur un jeton en or ou en argent. Unique, chaque médaille fait l’objet d’une vingtaine de contrôles qualité, à la main et à l’œil, tout au long de sa fabrication artisanale », explique Bruce Kirkpatrick.
Discrets sur leur activité et sur leur lieu de production, les fondateurs d’Anne.K enrichissent leur catalogue chaque année. Ils proposent actuellement vingt-trois modèles, déclinés en six tailles et six matières. Et la maison gersoise, qui emploie neuf personnes, ne compte pas en rester là. Courant 2026, elle intégrera un nouveau savoir-faire, en fabriquant, en plus des médailles, des anneaux et des bélières qui les accompagnent, les chaînes en or pour les porter. Dans son atelier de mécanique de précision qui a offert une seconde vie à de nombreuses machines anciennes, achetées d’occasion jusqu’aux États-Unis ou en Allemagne, deux tricoteuses incarnent ce chaînon manquant.
Johanna Decorse
Sur les photos : L’atelier Anne.K commercialise sur son site internet ses vingt-trois modèles, déclinés en six tailles, en or jaune 18 carats, en or gris, en argent massif rhodié, en vermeil et en nacre. // Anne Kirkpatrick sculptant le motif d’une médaille dans de la plastiline. // Son fils Bruce s’est formé dès 2016 pour pouvoir produire lui-même les matrices d’acier destinées à frapper les médailles. Crédits : Anne.K.