Pour le président du Medef 31, la rentrée 2023 se place sous le signe « de l’optimisme, avec des pincettes ». À l’occasion de la sortie de la 36e édition du Top Economique, classement annuel des principales entreprises d’Occitanie, Pierre-Olivier Nau et ses confrères ont détaillé les inquiétudes du syndicat patronal mais aussi ses satisfactions.
Le secteur de l’ingénierie, du conseil et du numérique navigue sur une mer d’huile. D’après une étude réalisée par le Syntec en juin 2023, 77 % des chefs d’entreprise se déclarent optimistes et confiants dans l’avenir et seuls 4 % prévoient une baisse de leurs commandes au second semestre. Toutefois, un tiers des dirigeants déclarent une activité en limite de rentabilité.
Toujours vecteur de croissance, l’industrie aussi se porte bien. En pleine refonte de sa convention collective, la métallurgie en profite pour plancher sur son attractivité : recrutement, formation et rétention des salariés. Le manque de bras se fait sentir dans les 8500 établissements occitans, dont les trois quarts comptent moins de cinquante salariés. Outre la pénurie de main-d’œuvre, Didier Katzenmayer, vice-président de l’UIMM, affiche aussi ses craintes liées à une conjoncture instable et au prix de l’énergie, freins aux volontés de développement.
Dans le transport, le premier semestre a marqué un net ralentissement de l’activité. Les entreprises se concentrent sur l’emploi, là aussi enjeu majeur, et le coût du carburant, principal levier des négociations clients et de la transition écologique.
« Il faut reprendre le chemin de la construction »
Les entreprises du bâtiment et de l’immobilier serrent les dents. Si la partie rénovation est en progression et représente désormais plus de 56 % de l’activité, les travaux sont à la traîne dans le neuf malgré le besoin en nouveaux logements, notamment dans l’agglomération toulousaine. Seuls 5600 logements ont été construits cette année alors que 10.000 sont nécessaires afin d’accueillir les nouveaux arrivants. « Le sujet est complexe », souligne Émile Noyer, président de la fédération du BTP de Haute-Garonne. « Les maires sont nombreux à ne pas vouloir de logements collectifs. Les habitants aussi s’y opposent, parfois vivement. Le prix est le principal problème, +20 % à 25 % en deux ans, à cause des hausses des coûts de l’énergie, des matériaux et des salaires. »
La crise du logement conditionne le pouvoir d’achat, l’emploi et le dynamisme des territoires. Pour Pierre-Olivier Nau, y apporter des réponses est « la priorité absolue » des cinq prochaines années. « Il en va de la capacité de nos salariés à se loger à des coûts raisonnables, près de leur lieu de travail », constate-t-il. Et donc, de trouver des candidats dans un contexte de recrutement de plus en plus tendu.
Salariés et employeurs : une relation qui s’est distendue
Face à la pénurie systémique de main-d’œuvre, l’emploi des seniors et le repêchage des demandeurs d’emploi feront l’objet d’une attention particulière. Sur le sujet des salaires, Pierre-Olivier Nau défend ses pairs. « Les entreprises sont au rendez-vous. Mais leur capacité à soutenir la hausse des salaires dépendra aussi de la fiscalité. Les différents projets de nouveaux impôts nationaux et locaux nous inquiètent », regrette-t-il.
Le syndicat des patrons se dit conscient des efforts à fournir pour attirer des salariés exigeants pour lesquels le travail ne représente plus le centre de la vie. Pas le choix. Les candidats 2023 attendent de leurs futures entreprises qu’elles répondent à leur quête de sens, au moins dans leur organisation, si ce n’est dans leur production. Dans le numérique, les ruptures de contrats d’alternance, à l’initiative des jeunes, se multiplient. La non-présentation aux entretiens ou pire, à l’embauche, s’est banalisée. Dans toutes les entreprises, « la relation au travail s’est abîmée ou, du moins, a changé », souligne le président du patronat, également « préoccupé par la hausse du nombre d’arrêts maladie ».
Cependant, les dirigeants d’Occitanie partagent le sentiment encourageant que le télétravail reflue. « Beaucoup d’accord de télétravail sont signés en cette période de l’année », explique Pierre-Olivier Nau. « Ce qui nous remonte semble indiquer que les salariés ont envie de retourner au bureau plus souvent. » En manque de la pause-café ? La tendance, trop mouvante encore pour être étayée par des chiffres, pourrait se confirmer dans les prochains mois.
Marie-Dominique Lacour
Sur les photos :
> Pierre-Olivier Nau, président du Medef 31. Crédits : Rémy Gabalda - ToulÉco.
> Frédéric Honnorat, Pierre-Olivier Nau, Didier Katzenmayer et Jocelyne Vidal du Medef 31. Crédits : M-D.L.- ToulÉco.