Zoé Gonzalvez, notaire : « Lors d’un divorce, le partage des biens n’est pas systématique »

Si divorcer marque rarement une période heureuse dans la vie des deux époux, une rupture n’est pas toujours source de conflit. Zoé Gonzalvez, notaire, revient sur le partage des biens : un acte notarial indispensable quand il y a un bien immobilier en commun et une étape clé dans la séparation.

Dans le cadre d’un divorce, quel est le rôle du notaire ?
Dès qu’il y a une séparation entre deux époux, il faut prendre un avocat. S’il est aussi recommandé de consulter un notaire, c’est parce qu’il fera en sorte que tout se passe bien, il expliquera le process, les conséquences civiles mais aussi fiscales du divorce et du partage des biens puisque chacun va reprendre ses biens propres mais les biens communs sont partagés, y compris les dettes. De façon générale, le notaire est expert des sujets relatifs à la liquidation, il vous pose des questions pratiques, concrètes et y apporte des réponses juridiques. À savoir que chez le notaire, le conseil est gratuit, seuls les actes sont facturés. Les époux peuvent solliciter le même notaire, surtout s’ils sont d’accord sur le résultat souhaité. À l’inverse, quand la situation est tendue, mieux vaut peut-être avoir recours à deux professionnels distincts pour apaiser le conflit, même si le résultat sera le même.

Peut-on divorcer sans passer au tribunal ?
Quand les deux parties s’entendent sur tout et qu’aucun enfant mineur ne demande à être entendu, il est possible, depuis 2016, de divorcer par consentement mutuel sans passer devant le juge. Chacun des époux doit choisir un avocat. Ceux-ci rédigeront un projet de convention de divorce, que tous les quatre devront signer et déposer ensuite chez un notaire. Si l’intervention du notaire n’est pas obligatoire en l’absence de biens immobiliers, elle peut toutefois s’avérer utile dans tous les cas.

Le partage des biens peut-il apporter des surprises ?
La législation est parfois subtile et les clients souvent surpris par les incidences. En l’absence de contrat de mariage, tout ce que vous avez avant le mariage et tout ce que vous recevez par succession ou donation pendant le mariage sont des biens propres. Mais voici un cas récent. Monsieur et Madame X, mariés sous le régime de la communauté, souhaitent divorcer. À la mort de ses parents, Monsieur X a hérité d’un bien immobilier. Il a contracté un prêt pour le rénover, puis l’a mis en location et rembourse son crédit avec les loyers perçus. Comme le bien hérité et le prêt sont en propre pour Monsieur X, on peut penser que tout cela n’a pas d’impact sur la séparation. Sauf que les revenus des biens propres sont communs : les loyers perçus reviennent donc pour moitié à Madame X, c’est ce que l’on appelle un droit-récompense. Pour éviter ce genre de déconvenue (pour Monsieur), mieux vaut consulter un notaire dès qu’un changement patrimonial ou immobilier a lieu au cours de la vie.

Quelles différences entre un divorce et une dissolution de Pacs ?
Beaucoup de couples hésitent entre Pacs et mariage et, à beaucoup d’égards, les deux se ressemblent. Toutefois, la loi diffère sur plusieurs points importants, notamment la prestation compensatoire, un versement d’argent sous forme de capital, dû par l’époux qui gagne le plus au moment de la séparation au profit de celui qui gagne le moins. Elle concerne tous les mariages, quel que soit le régime choisi, mais n’est pas prévue dans le cadre d’un Pacs. D’autres différences existent, notamment concernant les enfants issus d’une précédente union. Enfin, et même si cela concerne plutôt la succession, il est utile d’avoir en tête qu’avec un Pacs, hériter de son conjoint n’est pas automatique. Il faut faire un testament.

Divorcer, c’est forcément long et compliqué ?
Non, même si on peut vite arriver à cinq ou six ans avec les étapes judiciaires. Pour prendre en compte la situation pendant cette durée, le notaire doit créer un « compte d’administration » qui démarre à la date de la séparation et sera clôturé au moment de l’acte de partage des biens. Or, dans ces situations généralement malheureuses, le temps n’arrange rien : quand un divorce traîne en longueur, cela peut générer des complications, des difficultés pratiques pour récupérer des pièces ou valoriser des biens rétrospectivement... Un cas très dur m’a beaucoup marquée, où le jugement de partage des biens a été rendu après quinze ans de procédure, notamment parce qu’il fallait prouver des créances très anciennes. Peu de temps après, l’époux, très affecté par ces années de conflits, est décédé prématurément.

Le partage des biens est-il systématique ?
Aussi surprenant que cela puisse paraître, non, le divorce n’aboutit pas toujours à un partage. Souvent, les raisons sont d’ordre fiscales et financières et, parfois, c’est même la seule option, par exemple pour des époux qui ont fait des investissements locatifs communs : ils ont obtenu des prêts à deux mais, tout seul, ça ne passe plus. Si l’achat est récent, il est souvent préférable de rester en indivision le temps de la défiscalisation et de vendre ensuite.
Propos recueillis par Marie-Dominique Lacour

Sur la photo : Zoé Gonzalvez. Crédit : DR.

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Source : https://www.touleco.fr/Zoe-Gonzalvez-notaire-lors-d-un-divorce-le-partage-des-biens-n,39181