C’est le relèvement à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite qui soulève des vents contraires d’une rare intensité. Un front syndical aussi large et aussi soudé ne s’était pas vu depuis très longtemps : les huit principaux syndicats de travailleurs, qui ont appelé à défiler et à faire grève, jeudi 19 janvier, contre la réforme dévoilée neuf jours plus tôt par le gouvernement, ont été entendus.
À Toulouse, une foule de retraités, de lycéens et de salariés du public et du privé - ils étaient entre 30.000 et 50.000 selon les différentes sources - s’est élancée du métro François Verdier, peu après 10 heures, pour longer les boulevards, rejoindre Compans-Caffarelli et le pont des Catalans. Derrière une banderole commune au message simple et unique « retrait du projet de réforme des retraites », Silia, une Toulousaine institutrice à la retraite, défile pour que son fils, aide-soignant, « ait une retraite avant 80 ans ».
« Pour eux, la réforme est injuste »
Statique, debout sur le trottoir, Léa, 30 ans, employée à Pôle Emploi, observe les pancartes sur lesquelles on peut lire : « La retraite avant l’arthrose », « Macron quand c’est non, c’est non ! Prépare-toi à battre en retraite » ou encore « Les Français sont en borne-out » et « Métro-boulot-tombeau ». « Je suis obligée de mener une réflexion sur ma retraite. Je me dis que je n’ai plus le choix. Il faut que j’achète un appartement », explique Léa. « Jusque-là, la question ne se posait pas car nous étions encore dans un système social et communautaire. Or, avec la réforme, l’individu est la priorité. »
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« J’ai été embauchée à 27 ans par la mairie mais je ne peux pas tenir jusqu’à 67 ans », tonne Carine, agent territorial spécialisé des écoles maternelles (Atsem) à l’école maternelle Fabre, à Toulouse. « Je ne serai plus apte à m’occuper de petits enfants, je n’aurai plus d’énergie. Or, il faut une vigilance totale », pointe cette quinquagénaire. « Il faut prendre l’exemple sur l’Espagne, qui a passé les salariés à la semaine de 32 heures. Cela permet d’embaucher. »
Les salariés de Thales, de la Poste, de la SNCF, du CNRS sont venus grossir les rangs. Parmi les employés du privé, un gros bataillon d’Airbus. « Quarante-deux bus remplis de salariés se sont mobilisés , sans compter ceux qui ont fait le déplacement en voiture », se félicite Jean-Sébastien Seigné, secrétaire générale FO Airbus. « Je n’ai pas vu une telle mobilisation unie depuis 12 ans au moment du plan de restructuration Power8. Pour eux, la réforme est injuste. Deux ans de plus à travailler ne passe pas. »
Audrey Sommazi
Sur la photo : L’épais cortège toulousain contre le projet de réforme, jeudi 19 janvier.
Crédit : Rémy Gabalda -ToulÉco.