Lancé en 2011 dans l’ex-région Languedoc-Roussillon et élargi depuis, le TER à 1 euro poursuit toujours le même but de rendre le train plus accessible. Un TER pas cher... Contrepartie d’une mesure onéreuse : la Chambre régionale des comptes, qui s’est penchée sur le sujet, estime son coût à environ 9 millions d’euros en 2023. Si l’effort paraît minime au regard de l’imposant budget global de la Région Occitanie - 3,55 milliards d’euros -, il interroge sur la pertinence à long terme d’un tel dispositif dans un contexte budgétaire tendu.
« Faire peser plus sur le contribuable et moins sur l’usager, sachant que ce n’est jamais lui qui paie entièrement un service, est un choix politique assumé par la Région : nous n’avons rien à dire là-dessus. En revanche, il nous semblait important d’en mesurer et d’en donner le coût », explique Valérie Renet, présidente de la Chambre régionale des comptes. L’audit "flash" mené par la Chambre met en lumière des éléments contrastés.
Fréquentation en forte hausse
Le rapport souligne en premier lieu une hausse de fréquentation spectaculaire du train en Occitanie : +68 % entre 2019 et 2024, avec plus de 2,7 millions de billets à 1 euro vendus en 2023. Les offres jeunes et week-ends expliquent une bonne part de cette dynamique, représentant un quart de l’augmentation des voyageurs. « L’attractivité a augmenté, indéniablement. Pour autant, il convient de nuancer car l’Occitanie reste une des régions ou l’utilisation du train est la plus faible proportionnellement à sa population », constate Valérie Renet.
Le rapport pointe cependant les faiblesses du dispositif sur certaines lignes « historiques », comme l’Aubrac ou le Grau-du-Roi, coûteuses à entretenir et faiblement fréquentées. L’impact environnemental apparaît limité : « Les lignes à traction thermique ont, en effet, des taux d’émission de CO₂ par voyageur-kilomètre similaires à ceux de la voiture en raison de leur faible taux d’occupation, ce qui compromet l’objectif recherché », indique l’audit.
La Région préfère mettre en avant leur rôle social : « Ces dessertes permettent à des habitants de ne pas être assignés à résidence », défend Jean-Luc Gibelin, vice-président du conseil régional en charge des mobilités. Et d’ajouter : « Aucun TER n’a jamais été rentable. Au moins, grâce à ces offres, nous récupérons des recettes sur des lignes qui, sans cela, seraient désertées. » Pour l’élu, la stratégie repose sur le volume et non sur la hausse des tarifs : « Nous sommes en opposition totale avec le discours de Bercy, qui pousse à augmenter les prix. Nous, nous choisissons d’attirer vers le train. Et les résultats sont là. »
« La qualité du service prime pour les usagers »
La dynamique, réelle, reste inégale selon les territoires. De son côté, la Chambre constate que les effet du report modal, de la voiture vers le train, semblent encore assez limités en Occitanie. Et indique que la Région pourrait procéder à des évaluations comparatives plus poussées sur le sujet des mobilités. Les élus réfutent tout manquement : « Au départ, nous avons testé, puis ajusté par des enquêtes : elles sont faites, et souvent. Avec maintenant presque quatre ans de recul, nous savons qu’un tiers des usagers ont pris le train pour la première fois grâce au dispositif 1 euro, et que 40 % d’entre eux le réutilisent ensuite. Mois après mois, ça fait du monde ! », se félicite Jean-Luc Gibelin.
Selon la Région, le nombre de voyageurs TER atteint désormais 92.000 par jour, soit 12.000 de plus qu’en 2018. « Notre objectif est d’atteindre les 100.000 au plus vite », ajoute le vice-président. La Région n’envisage pas, pour le moment, de nouveaux déploiement du dispositif mais souhaite consolider ses récentes avancées et maintenir des tarifs progressifs, en favorisant notamment les jeunes et les clubs de sport.
Seul, le billet à 1 euro ne suffit pas à enclencher une véritable bascule vers le rail : si la tarification séduit, elle ne suffira pas à transformer les habitudes de mobilité. « La qualité du service est déterminante », rappelle Valérie Renet. L’audit souligne « l’état vétuste des infrastructures » et la nécessité d’investissements lourds pour fiabiliser le réseau. La Région, qui finance largement les rénovations, dit maintenir la pression sur l’opérateur : « Fiabilité, ponctualité, qualité… Nous ne lâchons rien », indique Jean-Luc Gibelin.
Marie-Dominique Lacour
Photo : Illustration - Un TER entre dans la gare de Luchon. La réouverture de la ligne Montréjeau-Luchon marque la volonté de la Région de ne pas abandonner les lignes historiques. Crédit : Marie-Dominique Lacour / ToulEco